Rédouane Faïd est le prisonnier le plus célèbre de France de par ses évasions restées dans les annales, mais surtout par sa « philosophie » de la vie.
Nous en parlons aujourd’hui, parce que son procès va débuter dans quelques semaines, peut-être quelques mois.
Coupable de vols à main armée, spécialisé dans l’attaque de fourgons blindés, il est aussi connu pour avoir réussi à s’évader de prison à deux reprises, en 2013 puis en 2018.
D’origine algérienne, sa famille a quitté l’Algérie en 1969 pour s’installer en France. Rédouane Faïd naitra trois années plus tard, en 1972, en Picardie.

Il est l’image du bandit de jadis, poète à ses heures perdus, intellectuel populaire et cherchant toujours l’argument pour habiller ses méfaits.
Il aime les médias et médiatise ses coups d’éclats. Il a été pendant une année, un habitué des plateaux et les chaines de télévisions le payaient pour l’avoir dans un plateaux télé.
Rédouane Faïd, un cas d’école dans le banditisme
Cela n’enlève rien à son statut de bandit, mais lui fait porter un habillage spécial qui lui a permis l’estime de milliers de personne à travers le monde.
La communauté algérienne en France est toujours restée en retrait de Faïd, considérant ses alliances avec les milieux du banditisme français comme une affaire franco-française.
En 1990,à 18 ans, il fait la connaissance avec le grand banditisme alors qu’il est en terminale, Rédouane Faïd braque une agence du Crédit du Nord.
En 1996, un des complices de Faïd est arrêté par la police et le dénonce. Il fuit en Algérie, mais revient quelques jours plus tard en France, muni de faux papiers.
Le 3 juillet 1997, il attaque pour la première fois un fourgon blindé à Villepinte. Faïd est blessé par balle à l’épaule par la police ; lui et ses complices parviennent néanmoins à s’enfuir avec leur butin, estimé à 2.7 millions de francs (400000€).

Le sang perdu par Faïd permettra aux policiers de l’identifier et de le faire rentrer dans les fichiers de la PJ. Une fois son ADN identifié, la police l’utilise afin d’accumuler les indices contre lui.
Spécialiste des évasions
En septembre 1998, il est arrêté et menotté une première fois dans un train pour détention de faux-papiers en Suisse.
Il parvient à s’échapper, mais il est rattrapé car il s’est blessé à cause d’une chute et doit être hospitalisé. Il s’échappe à nouveau en volant l’arme d’un des policiers suisses qui l’escortaient à l’hôpital.
Mais le billet de train qu’il avait lors de sa première arrestation en Suisse permet à la police française de remonter la trace jusqu’à l’agence de voyages à Paris qu’il utilise pour organiser ses déplacements.

Après trois mois de cavale, il est arrêté le 28 décembre 1998 en sortant de cette agence de voyages. Il est condamné à 18 ans de prison pour vol à main armée. Il bénéficie d’une libération conditionnelle pour bonne conduite le 30 mars 2009, après dix années de détention.
Un homme rangé? Attendez un peu…
Peu après sa libération, il interpelle en public le cinéaste Michael Mann à la Cinémathèque française, en lui disant que ses films ont participé à son instruction de gangster. Il apprécie particulièrement son film Heat qui met en scène un braquage de fourgon de transport de fonds, qu’il aurait vu à de très nombreuses reprises comme source d’inspiration pour préparer ses braquages.
Faïd se marie ; son frère Rachid l’aide à obtenir un emploi d’attaché commercial auprès d’un de ses anciens employeurs.
En 2010, Faïd publie un livre, co-écrit avec le journaliste Jérôme Pierrat, sur son expérience de braqueur repenti « Braqueur : Des cités au grand banditisme », qu’il présente au Grand Journal de Canal+. Il effectue alors le tour des plateaux télévisés pour faire la promotion de son livre, où il indique notamment sur LCI que « ses démons sont complètement morts » et qu’il en aurait fini avec le banditisme.
Cependant, il est à nouveau soupçonné d’avoir participé à une attaque à main armée d’un convoi de fonds le 20 mai 2010, au cours de laquelle une policière municipale de 26 ans, Aurélie Fouquet, est tuée dans l’exercice de ses fonctions. Rédouane Faïd est arrêté le 28 juin 2011 en raison des forts soupçons qui pèsent sur lui.
Encore des évasions
Il s’évade le 13 avril 2013 au matin du centre pénitentiaire de Lille-Loos-Sequedin (Nord) à l’aide d’explosifs et après avoir pris quatre personnes en otage, utilisant une arme qu’il transporte dans un paquet de linge sale. Un mandat d’arrêt européen est émis le jour même. Faïd est également recherché par Interpol dans les 190 pays membres.

Alors qu’il cherche à se procurer une fausse identité pour rejoindre Israël, son vendeur de faux papiers pose son téléphone portable dans la voiture où se déroule la transaction, ce qui permet à la police de géolocaliser Faïd. Un mois et demi après son évasion, il est interpellé le 29 mai à trois heures du matin dans un hôtel en Seine-et-Marne. Il est alors incarcéré au quartier d’isolement de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis et encourt la réclusion criminelle à perpétuité.
Selon ses dires, Faïd se serait alors rendu en Israël où il aurait suivi une formation à la manipulation des explosifs avec la mafia israélienne.
Enfin il est condamné le 19 octobre 2017 à 18 ans de réclusion par les assises du Nord pour le braquage d’un fourgon blindé dans le Pas-de-Calais en 2011.
Le 14 avril 2018, la cour d’assises de Paris aggrave en appel la peine de Rédouane Faïd, en portant à 25 ans la durée de sa réclusion pour le braquage raté et la fusillade de Villiers-sur-Marne en 2010 : la cour juge en effet qu’il est l’organisateur de ce braquage ayant entraîné la mort de la jeune policière Aurélie Fouquet. Ce jugement est confirmé en mai 2019 par la Cour de cassation.
La plus célèbre évasion de France
Lui en prison, ses amis utilisent des drones pour survoler la prison de Réau, où il est détenu.
Le 1er juillet 2018, il s’évade en hélicoptère Alouette du centre pénitentiaire du sud-francilien à Réau en Seine-et-Marne, aidé par trois complices cagoulés, armés de fusils d’assaut kalachnikov, alors qu’il se trouvait au parloir avec son frère Brahim.
Pour cela, ils aveuglent des caméras de surveillance avec des fumigènes et découpent à la disqueuse les portes qui menaient au parloir, avant de s’enfuir avec l’hélicoptère dont le pilote avait été pris en otage par les complices du braqueur. Le pilote est relâché après l’évasion.
Trois mois après, il est finalement arrêté le 3 octobre au matin, trois mois après son évasion, dans sa ville natale de Creil35. Durant sa cavale, Redoine Faïd se dissimulait sous une burqa pour ne pas être reconnu.
La gifle a été tellement cinglante pour les autorités françaises qui on mobilisé tout l’arsenal de l’Etat pour le retrouver et le remettre en prison, d’autant qu’il s’était déjà échappé de prison une première fois.

Il aura fallu des moyens colossaux et des brigades mobilisées 24h/24 pour le reprendre dans une chambre, tranquillement en train de fumer une cigarette. Il n’a ni bougé ni opposé une résistance : comme tout oiseau noble il a levé les mains en l’air et s’est laissé menotter.
Le 13 mars 2020, il est condamné à 28 ans de réclusion criminelle (dix ans de plus qu’en première instance).
Il est à nouveau incarcéré au quartier d’isolement de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis dans un quartier de haute-sécurité. En 2023, il est en attente de son procès pour l’évasion de la prison de Réau en 2018.
Profil psychologique
L’expertise psychiatrique réalisée pour le procès en mars-avril 2016 à Paris, dit qu’il est « doué pour la manipulation », qu’« il utilise les qualités de sa personnalité, charme, intelligence, courage, réactivité… pour contrôler les autres et obtenir ce qu’il souhaite. »7. L’expert psychiatre de 2017 dit de lui qu’il est un « histrion à la recherche de sensations fortes », qu’il n’est ni antisocial ni psychopathe et qu’il jouit d’une brillante intelligence.
Son éditeur, Pierre Fournaud, qui l’a rencontré de nombreuses fois pour écrire sa biographie, dit que Faïd n’est pas motivé seulement par l’argent, mais surtout et avant tout par un besoin de reconnaissance, d’où son besoin de se faire médiatiser par des actions spectaculaires et de faire écrire un livre sur lui.

Le journaliste Jérôme Pierrat, spécialiste du grand banditisme et qui a aussi participé à l’écriture de la biographie, parle de lui en ces termes :
« Il essayait de modéliser ses coups sur ses héros de cinéma et puis c’était un garçon plutôt charmant, c’était l’antithèse du gangster sociopathe comme on peut l’imaginer. Ce n’était pas du tout le profil des gens qu’on va trouver à Marseille et qui s’entre-tuent à coups de kalachnikov pour du haschich, lui c’était plutôt un type affable, poli, bien mis comme on dit et portant un costume bien coupé. Il n’avait pas du tout le profil d’un caïd de banlieue comme on pourrait l’imaginer et ça n’était d’ailleurs pas un caïd de banlieue, il s’est bien gardé de frayer dans cette mouvance et dans ces territoires. »